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Mots, concepts, symboles et idées (philosophie et spiritualité)

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Mots, concepts, symboles et idées : comment les aborder sur le plan philosophique et spirituel ? Qu’est-ce que le langage, de quoi est-il le reflet ? Peut-on penser sans mots ?

L’être humain a ceci de particulier qu’il emploie des mots pour penser, s’exprimer et communiquer.

Ces mots sont des outils qui reflètent des objets concrets ou des notions plus abstraites : ils sont des constructions, des concepts (du latin cum capio : saisir ensemble) au sens où l’on donne un nom à quelque chose qu’on souhaite identifier et définir en tant que tel, en généralisant ses caractéristiques.

Autrement dit, les concepts délimitent et simplifient la réalité : ils isolent un phénomène pour le caractériser et le résumer. Ainsi, les mots et les concepts créent des frontières, séparent, mais peuvent aussi être réunis pour former des phrases en vue de décrire la réalité, l’interpréter, ou bien créer une autre réalité, ou encore développer des idées voire des théories.

Voyons comment aborder les mots et les concepts en philosophie et spiritualité.

Mots, concepts, symboles et idées en philosophie et spiritualité

L’essence et la nature des mots peut être abordée à travers la querelle entre réalistes et nominalistes.

Selon le point de vue réaliste, les mots qui désignent les objets sont des symboles universels assimilables aux « idées » au sens platonicien : ils traduisent une réalité métaphysique parfaite pour peu qu’ils s’inscrivent dans un langage « vrai ». Ils forment une représentation exacte du monde au sens vibratoire, de ses principes, de ses entités cosmiques qui, en descendant graduellement dans le manifesté, se subdivisent en différents mots correspondant aux formes du monde naturel. En ce sens, les mots peuvent avoir un caractère sacré.

Au contraire, selon le point de vue nominaliste, les mots sont purement conventionnels : aucun lien naturel ni nécessaire ne les relie aux choses. Ils sont des signes, un codage qui n’exprime aucune universalité. Ils sont de simples outils qui permettent d’exprimer des phénomènes éphémères et des idées floues, mouvantes, parcellaires, imparfaites.

Entre ces deux théories se situe le point de vue conceptualiste : l’universel se trouverait dans la « nature » de l’objet dénommé. De cette conception naissent toutes sortes d’idéalismes à prétention métaphysique.

Les mots : utilité et limites

Dans la pratique, les mots sont très limités et insuffisants pour accéder à la réalité. Nous l’avons dit, ils établissent des séparations artificielles au sein du réel, selon des normes et des conventions liées à la culture du groupe humain considéré.

Le rôle premier de la parole est en effet de permettre la communication sur la base de définitions partagées. Chaque groupe humain utilise ses propres mots et leur attribue un sens particulier. Certains mots peuvent exister dans une culture et pas dans une autre : par exemple, la langue Kusunda (Népal) ne connaît ni le mot « oui » ni le mot « non », ce qui introduit une manière particulière de voir les choses, qui se transmet de génération en génération.

Ainsi les langues formatent la réalité et créent un monde artificiel, selon l’approche de la société et de la culture en question. Ici les mots sont avant tout des outils de cohésion sociale qui permettent d’harmoniser les façons de penser et de vivre.

Les mots : obstacles à la spiritualité ?

Les mots créent un monde illusoire. En séparant les choses, ils nous éloignent de certaines réalités métaphysiques et spirituelles, par exemple le fait que tout est lié et que rien n’existe en soi. En l’occurrence, les mots nient le caractère éphémère de toute chose, ils oublient l’interdépendance et l’impermanence qui règnent dans l’univers.

Clairement, les mots nous maintiennent dans le bain des impressions, des préjugés et des illusions. Par exemple, le mot « papier » définit la matière sur laquelle on écrit, mais oublie la nature des énergies qui ont permis sa création : le bois, l’eau du ciel qui a permis aux arbres de grandir, le soleil, l’ensemble des éléments physiques et même le cosmos tout entier. Le papier est bien le résultat éphémère de toutes les forces cosmiques.

Autrement dit, les mots décomposent ce qui ne peut être décomposé. Ils sont le reflet d’une vision matérialiste et utilitariste du monde, c’est-à-dire centrée sur les besoins des êtres humains. Et même lorsque les mots s’assemblent pour construire des raisonnements, ces constructions se révèlent souvent décevantes, imparfaites ou déconnectées.

Pourtant, les mots sont nécessaires pour pouvoir penser, communiquer et s’élever : en nommant nos perceptions immédiates, nous pouvons aussi nous interroger sur elles, et voir plus loin. Si les mots nous enferment, ne peuvent-ils pas aussi nous libérer ?

Le symbole : un élargissement de la pensée

Au-delà des mots courants, les symboles ouvrent la voie à une interprétation plus large, laissant une plus grande place à l’intuition.

Un symbole est un élément concret (un signe, un objet) qui renvoie à quelque chose qui n’est pas précisément défini, qui est absent, abstrait, difficile à saisir.

Le symbole est un point d’appui qui permet l’ouverture de la pensée, la recherche et l’interprétation ; il aide à progresser sur les voies de la métaphysique et de la spiritualité. On passe de la perception immédiate par les sens à une perception par l’esprit.

Alors que les mots sont l’expression canalisée des besoins et pulsions humaines, les symboles introduisent une quête spirituelle en vue de comprendre toujours mieux le cosmos, sa structure et son sens. Le langage devenu symbolique se fait universel.

En réalité, chaque mot peut être abordé comme un symbole. Il s’agit alors de dépasser sa définition littérale pour s’ouvrir à sa nature profonde. Les mots gagnent alors en valeur.

Certains mots portent même en eux ce caractère supérieur, par exemple le « Tout », « l’Absolu » ou « l’Universel ». Des mots à haute valeur spirituelle donc, qui s’écrivent avec une majuscule.

Quant aux mots du quotidien, ils ne doivent pas être considérés comme des objets stables, mais comme des points, des carrefours permettant de décrire des phénomènes eux-mêmes inclus dans un système plus large.

Au-delà de ces considérations, on peut se poser la question de savoir quelle est la source de la pensée : question bien difficile, mais certainement clé de compréhension de l’essentiel.

Lire aussi notre article : Le symbolisme : outil ésotérique et tremplin spirituel

Modif. le 18 août 2024

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