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Y a-t-il des idées vraies ?

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Y a-t-il des idées vraies ? Existe-t-il des vérités ultimes, accessibles et exprimables ? Y a-t-il des paroles de sagesse universelles ?

Les philosophes ont toujours été à la recherche de la vérité, une vérité qui semble pourtant lointaine et insaisissable. Même si certains raisonnements peuvent paraître fondés, en particulier parce qu’ils semblent logiques, l’expérience montre qu’ils peuvent être remis en cause ou relativisés, bien loin d’une vérité absolue.

Selon les sceptiques de l’Antiquité, tout raisonnement peut être réfuté. Les certitudes sont à fuir, un point de vue étant par définition relatif, fondé sur des passions ou des perceptions partielles. Par conséquent, les dogmes, les théories et les opinions n’ont que peu de valeur.

Tout échappe à la compréhension. 
Sextus Empiricus

Mais paradoxalement, cette vision sceptique voire perplexe permet d’accéder à une première vérité fondamentale : je sais que je ne sais rien.

Tentons de voir s’il y a des idées vraies ou des vérités accessibles.

Y a-t-il des idées vraies ?

Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien, dit Socrate dans une perspective éminemment sceptique. Voici donc la première vérité universelle : nous sommes ignorants, incapables d’accéder à la vérité.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il ne s’agit pas d’un constat d’échec mais d’une première victoire remportée sur l’erreur et l’illusion. Car cette idée marque notre entrée dans le domaine de la pensée juste : en reconnaissant que notre vision ne peut être que partielle, nous pouvons enfin nous détacher de nos préjugés, repousser nos limites personnelles et voir plus loin.

Dans le même ordre d’idée, le célèbre « je pense donc je suis » de Descartes s’appuie sur le doute. Pour le fondateur de la philosophie moderne, douter de chaque idée qui nous vient à l’esprit nous tire de l’erreur. C’est alors qu’apparaît la première vérité stable : je pense donc je suis, dans le sens de je doute donc je suis, autrement dit j’existe par moi-même, car je suis en capacité de m’extraire de tout ce qui m’influence et m’aveugle.

Ainsi, on peut considérer que les phrases suivantes sont vraies :

  • « mes jugements ne peuvent être que relatifs »
  • « ma vision du monde est partielle, incomplète et déformée »
  • « je ne suis pas en capacité de comprendre le monde ».

On pourrait penser que notre capacité même à philosopher se trouve remise en cause par ce constat négatif et presque décourageant. Peut-on continuer à réfléchir en sachant que nos efforts sont vains ? En réalité, nous allons voir que cet état d’esprit ouvre la voie à une nouvelle philosophie, et mieux encore, à la spiritualité.

Une nouvelle manière d’aborder le monde

Nous l’avons dit, toute théorie, idée ou opinion qui semble vraie peut être remise en cause. Nos croyances sont le résultat de nombreux déterminismes liés à notre génétique, à notre culture, à notre éducation, à notre psychologie, à notre chemin de vie : autant d’éléments dont nous n’avons même pas conscience. Nos convictions sont certes légitimes mais extrêmement limitées.

Même dans le domaine des sciences, tout peut être remis en cause. Prenons un exemple. Durant des décennies, les chercheurs ont défini la vie comme l’ensemble des forces qui luttent contre la mort. Mais depuis peu, certains ont été amenés à reconsidérer leur opinion : ils définissent désormais le phénomène vivant comme l’ensemble des forces qui se nourrissent de la mort. Mais alors, où se trouve la vérité ? En réalité, il se pourrait bien que les deux thèses soient vraies, du moins partiellement.

C’est, à peu de choses près, ce que montre le schéma suivant :

schéma vérité

Les trois représentations ci-dessus sont vraies, mais aucune ne peut résumer à elle seule la vérité finale. Autrement dit, la vérité est partout et nulle part. La vérité absolue est insaisissable, tout simplement parce que nos perceptions sont partielles et relatives, mais aussi parce que le monde est mouvant, instable, impermanent et enfin parce que rien n’existe en soi comme un phénomène autonome, séparable du reste et parfaitement observable.

De là, étonnamment, d’autres vérités surgissent :

  • dire que tout est relatif devient une vérité absolue,
  • dire que rien n’est vrai revient à dire que tout est vrai,
  • la seule chose stable dans ce monde est son instabilité,
  • l’impermanence est permanente,
  • dire que tout est insaisissable, c’est enfin saisir la réalité des choses,
  • dire que nos perceptions ne peuvent être que partielles ouvre la voie à l’universel,
  • reconnaître que nos jugements sont imparfaits nous conduit à réaliser la perfection du monde, au-delà de l’illusion que les choses devraient être autrement,
  • renoncer à toute idée pour soi-même nous permet d’accepter toute idée venant de l’extérieur,
  • reconnaître que nous ne pouvons pas avoir de pensée libre nous libère de toutes nos illusions.

Ainsi, de dévoilement en dévoilement, de renoncement en renoncement, la vérité se laisse approcher.

Autre constat, la vérité s’approche par les paradoxes : du négatif surgit le positif. Et en observant une nouvelle fois la schéma plus haut, on peut aussi dire que la vérité est à la fois une chose et son contraire.

Les paroles vraies semblent paradoxales.
Tao Te King, 78

Sur le plan de la spiritualité, qui peut être définie comme la recherche de la vérité ultime, une voie s’ouvre : celle du renoncement et de l’acceptation, afin d’atteindre la vraie Lumière. Poursuivez la réflexion avec cet article : La spiritualité par la voie sombre

Couverture les Essentiels de la Spiritualité Adrien Choeur

Qu’est-ce que la spiritualité ? Quel est le but à atteindre ? En quoi consiste la méthode spirituelle ? Quel lien avec la philosophie ?

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Modif. le 17 mars 2024

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