La truelle : que symbolise cet outil ? Interprétation à travers cette planche maçonnique.
La truelle est un outil discret en franc-maçonnerie, du moins en loge symbolique. Elle n’apparaît pas sur les tableaux de loge, sauf au Rite Ecossais primitif. Elle est pourtant citée dans le discours du chevalier Ramsay dès 1736.
Au Rite Français, le compagnon reçoit la truelle des mains du Vénérable Maître lors de son cinquième voyage : voilà l’outil qui lui permettra de finaliser l’assemblage des pierres.
Par ailleurs, la truelle est citée au 14ème degré du R.E.A.A. : la « truelle d’or » sert à manipuler l’encens de l’autel des Parfums.
La truelle est encore présente au Rite York Ancien Libre et Accepté, où l’Ordre de la Truelle d’Argent est un degré dont le bijou est précisément une truelle.
On retrouve enfin la truelle dans le vocabulaire du banquet d’ordre : le franc-maçon façonne la pierre brute (le pain) avec son glaive (couteau), sa pioche (fourchette) et sa truelle (cuillère).
Au sens profane, on peut distinguer deux sortes de truelles :
- la petite truelle triangulaire permet de lisser d’une manière parfaite la matière dans les angles : c’est la truelle du plâtrier,
- la truelle du maçon (qui nous intéresse ici) est plus grande, en forme de trapèze avec l’avant arrondi. Elle sert à façonner le mortier en le gâchant, à le projeter pour crépir, colmater les pierres entre elles par remplissage, effacer les différences entre les pierres, aplanir, lisser, etc.
La truelle est donc indissociable du mortier. C’est un outil d’assemblage et de finition.
Entrons dans le symbolisme maçonnique de la truelle.
Le symbolisme de la truelle : interprétation
La truelle est un outil de maçonnerie par excellence. En l’occurrence, elle permet le jointage des pierres et assure leur stabilité, leur adhérence, leur cohésion.
La truelle traduit donc l’intention d’unir, de lier de manière indéfectible. Elle est l’outil qui permet de réaliser cette ambition.
D’autre part, la truelle est de forme triangulaire, ce qui lui confère une haute valeur spirituelle et symbolique : elle véhicule à la fois la Sagesse (la prise de conscience de l’Amour), la Force (le lien inaltérable) et la beauté (la finalisation de l’édifice).
La truelle est parfois représentée avec un œil en son centre qui symbolise la Connaissance.
La truelle, outil de la fraternité
La truelle est indissociable du mortier (le « liant »), qui symbolise l’élément qui relie tous les autres, sorte de Quintessence alchimique.
La truelle symboliserait donc la capacité à mobiliser et à maîtriser ce « cinquième élément », élément cosmique mystérieux qui englobe et relie toute chose. C’est le ciment de l’Univers, autrement dit la force d’Amour qui fait la synthèse de tout.
Pour nous, la Quintessence représente le lien fraternel qui nous unit afin que nos personnalités puissent s’imbriquer au sein de l’édifice de la loge et de l’humanité.
La truelle permet en effet :
- de remplir les interstices,
- de gommer les irrégularités,
- de souder les pierres entre elles.
En d’autres termes, puiser et modeler le mortier avec la truelle, c’est pratiquer la fraternité. La truelle est un outil actif, efficace et précis, qui permet de rajouter du mortier en cas de besoin, par exemple pour combler une incompatibilité entre deux pierres. La truelle comble les différences, les discordances, les désaccords. Elle répare les fissures. Elle rassemble ce qui est épars.
Manier le mortier et la truelle, c’est donc faire l’effort de voir et cultiver le lien qui existe entre tous les hommes : c’est prendre conscience de notre condition commune, du fait que nous avons besoin les uns des autres, et du fait que nous sommes fondamentalement égaux.
Passer la truelle, c’est encore « passer l’éponge », « arrondir les angles », c’est-à-dire pardonner, oublier les offenses et les désaccords. C’est parfaire le lien fraternel, le sceller, le fêter.
Le mortier et la truelle unifient les différences sans pour autant les nier : c’est l’outil de la bienveillance, de la tolérance, de la patience, celui de la pratique active de l’amour fraternel.
La truelle est signe d’intelligence, autrement dit de capacité à s’adapter à toutes les situations, à tous les individus, ce qui nécessite de comprendre le comportement et les réactions de chacun.
Bien sûr, la connaissance des autres passe par la connaissance de soi : l’introspection est nécessaire pour savoir ce qui nous conduit parfois à rejeter les autres.
Bâtir, c’est aimer
La truelle en franc-maçonnerie est l’outil de l’unification par la fraternité, l’outil de l’Alliance.
L’ouvrier ne fait pas que tailler et superposer des pierres. Il doit préparer le mortier, le gâcher afin qu’il ne soit ni trop épais ni trop liquide, de la même manière que le franc-maçon ne doit être ni trop rigide ni trop lâche envers ses pairs. Il doit ensuite appliquer le mortier comme un pansement sur les maux de l’humanité.
Manier la truelle n’est pas facile. Cela nécessite un parfait coup de main et un certain savoir faire. De même, sceller une amitié nécessite beaucoup de maîtrise et de tact : nous sommes au coeur du travail maçonnique, un travail concret, qui est d’abord un travail sur soi.
Au final, la fraternité est le seul ciment que les ouvriers devraient employer dans l’édification du temple. A ce titre, le maniement du mortier et de la truelle font écho aux plus nobles valeurs maçonniques.
La truelle est l’outil par lequel l’œuvre du constructeur s’achève et devient parfaite, c’est par le travail que l’homme devient meilleur. C’est une véritable mission.
Rituel 2ème degré RF
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Modif. le 4 août 2025