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La tolérance : définition philosophique

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La tolérance : définition philosophique. Qu’est-ce que la tolérance ? Faut-il être tolérant ? Y a-t-il des limites à la tolérance ?

La tolérance est parfois vue comme une qualité mais le plus souvent comme une faiblesse voire une lâcheté, sans doute du fait de son caractère passif, sans consistance. Au mieux, la tolérance est définie comme le plus petit degré de l’amour.

La tolérance ? Il y a des maisons pour ça !
Paul Claudel

Cette célèbre citation de Paul Claudel, pour abrupte qu’elle soit, traduit le rejet classique de la notion de tolérance, entre autres par les conservateurs. Les maisons closes étaient tolérées, mais ça n’est pas pour autant qu’elles étaient un symbole de progrès, de liberté ou de bonheur.

Pourtant, la tolérance ouvre la voie aux valeurs fondamentales du vivre ensemble : le respect, la réciprocité, l’humilité, l’altruisme. Or ce sont ces valeurs qui permettent l’établissement d’une société libre, dans laquelle tout le monde peut être accepté et trouver sa place.

Faut-il pour autant tout tolérer ?

Voici une définition philosophique de la tolérance.

La tolérance : définition philosophique.

Définition : La tolérance est l’attitude qui consiste à admettre une manière de penser ou d’agir différente de la sienne.

En réalité, il y a deux manières d’aborder la tolérance :

  • la première est politique : elle concerne l’organisation de la société, les lois, la morale et la capacité à vivre-ensemble. Nous verrons que dans ce sens précis, la tolérance s’accompagne de limites,
  • la seconde est métaphysique : la tolérance peut alors être définie comme la recherche de l’origine et des causes profondes des phénomènes, des modes de pensée ou des comportements. Cette tolérance-là ne connaît aucune limite dans la compréhension et l’acceptation.

Alors que la tolérance politique s’intéresse aux effets des comportements et des idées, la tolérance au sens métaphysique tente d’en analyser les causes.

La tolérance au sens politique.

Au sens éthique ou politique, la tolérance comporte des limites nécessaires. En effet, tout tolérer serait sombrer dans le relativisme : toutes les positions seraient acceptables, même les plus folles, même les plus intolérantes… ce qui aboutirait par là-même à faire disparaître la tolérance et la liberté.

C’est le paradoxe de la tolérance, paradoxe que seule la loi peut dénouer (lire aussi notre article : Faut-il tolérer l’intolérance ?).

En fixant des limites, la loi garantit l’espace de tolérance le plus large possible, dans une logique d’équilibre et de réciprocité.

Ce cadre permet l’harmonie sociale autour de valeurs partagées : respect de la vie humaine, respect des différences, liberté d’opinion, refus des actes ou des idées pouvant mener au désordre ou à la violence. La tolérance est donc au service du vivre-ensemble, à l’image des lois de 1905 sur la laïcité.

Mais la tolérance n’est pas qu’un cadre, elle est aussi une valeur active : le moteur du progrès social et humain.

La tolérance, moteur du progrès social.

Face à l’apparition de comportements différents ou d’idées nouvelles, nous avons tendance à nous méfier, à nous replier voire à rejeter.

Faire preuve de tolérance, c’est au contraire faire l’effort de s’ouvrir : nous tentons de dépasser nos a priori, d’observer et de réfléchir jusqu’à ce que l’ignorance et le doute se dissipent.

La tolérance n’est pas une concession que je fais à l’autre, elle est la reconnaissance du principe qu’une partie de la vérité m’échappe.
Paul Ricoeur

Une société tolérante est donc fondée sur la curiosité et l’ouverture, ce qui favorisera l’enrichissement mutuel et le progrès social. C’est aussi une société qui fait confiance à la raison, outil qui permet de distinguer le vrai du faux, le bien du mal, et au final de trier ce qui est tolérable de ce qui ne l’est pas.

Lire aussi notre article : Comment distinguer le bien et le mal ?

La tolérance au sens métaphysique.

Au sens métaphysique (ou spirituel), la tolérance s’affranchit de toute référence morale : il n’est plus question de savoir ce qui est bien ou mal, tolérable ou intolérable, mais de rechercher les causes des phénomènes observés.

Tolérer signifie alors accepter et comprendre, sur le principe que chaque évènement, acte ou idée est le résultat de causes qui ont été oubliées et qu’il convient d’identifier. Les jugements et les a priori cèdent la place à l’évidence que les choses ne peuvent être que ce qu’elles sont.

Autrement dit, tolérer consiste à reconnaître que tout est en ordre, que tout est conforme aux lois universelles, même si certaines choses nous révoltent. S’il y a intolérance, elle ne peut venir que de notre ignorance des causes de ce qui se produit.

Il y a derrière cela l’idée que tous les phénomènes et les êtres sont liés et interdépendants. La tolérance ne connaît plus de limites car le monde lui-même ne connaît aucune séparation en son sein. Le jugement et le rejet sont vains car ils reviendraient à s’exclure soi-même.

Cette approche métaphysique est certes dénuée de morale, puisque tout est toléré (au sens de « reconnu » ou « compris »), même les actes les plus immoraux. Pourtant elle introduit une valeur morale essentielle : l’amour. L’amour est la manifestation du lien qui unit toutes les choses : c’est le ciment du monde.

C’est cet amour qu’il faudra porter en priorité à ceux qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire ceux qui se montrent violents et intolérants, étant entendu que le mal qu’ils font ne peut être intentionnel.

Conclusion sur la tolérance et sa définition philosophique.

Bien sûr, cette approche de la tolérance au sens métaphysique ne peut pas être appliquée à la sphère politique. Au quotidien, la tolérance doit réaffirmer ses principes et exiger la réciprocité.

Mais sanctionner ne veut pas dire haïr, et tolérer ne veut pas dire excuser. Il est de notre devoir de continuer à rechercher les causes de ce qui se produit, tout en se montrant ferme sur le plan moral : c’est en ce sens que la tolérance touche à la justice.

La tolérance est alors la manifestation d’un équilibre ou d’une harmonie : une ligne de crête qui laisse de côté aussi bien le laxisme que la rigidité froide.

Lire aussi notre article : La vérité, qu’est-ce que c’est ? comment l’atteindre ?

Modif. le 2 mars 2022

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