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Tao Te King 20 : « arrêter de penser »

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Tao Te King 20 : texte et commentaire du chapitre. Pourquoi arrêter de penser ? Quel est le comportement et l’état d’esprit du sage ?

Ce chapitre est certainement l’un des plus étonnants du Tao Te King de Lao-tseu.

Ici, le Maître-fondateur du taoïsme renverse toutes les évidences. Il va à l’encontre de ce qui semble être le bon sens et la sagesse.

Ce verset exprime un certain relativisme voire un nihilisme : il n’y aurait pas de différence entre le oui et le non, ni entre le bien et le mal.

Pourtant, ce chapitre permet mieux que les autres d’approcher la « grande source », expression de l’ordre cosmique absolu.

Surtout, il décrit le comportement de l’homme éveillé, qui consiste à fuir l’illusion de détenir la vérité.

Voici donc Tao Te King 20, texte et interprétation.

Tao Te King 20 : texte.

Entre parenthèses : traduction alternative.

Arrête de penser, et finis-en avec tes problèmes.
(Renonce à l’étude, et tu seras exempt de chagrin.)
Quelle différence y a-t-il entre oui et non ?
Quelle différence y a-t-il entre succès et échec ?

(Quelle différence y a-t-il entre le bien et le mal ?)
Dois-tu estimer ce qu’estiment les autres,
éviter ce que les autres évitent ?
Ridicule !

Les autres sont excités
comme s’ils étaient à la parade.
Moi seul suis indifférent,
moi seul suis sans expression
comme un nouveau-né avant qu’il ne sache sourire.

Les autres ont ce qu’ils veulent.
Moi seul ne possède rien.
Moi seul vais à la dérive,

(je ne sais où aller,)
comme quelqu’un sans foyer.
Je suis tel l’idiot, mon esprit est si vide.

Les autres sont lumineux ;
moi seul suis sombre.

(je suis plongé dans les ténèbres.)
Les autres sont vifs ;
moi seul suis insipide.

(mon esprit est trouble et confus.)
Les autres ont une raison d’être ;
moi seul ne sais pas.
Je dérive comme une vague sur l’océan,
je voyage sans but, comme souffle le vent.

Je suis différent des autres.
(Je suis stupide et rustique.)
Je bois au sein de la Grande Mère.

Tao Te King 20 : « arrêter de penser ».

En refusant de choisir entre oui et non, bien et mal, Lao-tseu introduit l’idée que tout ce qui arrive et conforme à l’ordre des choses : il n’y a donc pas d’injustice ou de malheur en tant que tel.

C’est notre mental qui interprète les situations, en fonction de nos besoins, de nos préférences et de nos intérêts : c’est ainsi que nous voyons le bien et le mal partout, selon notre point de vue, par le « petit bout de la lorgnette ».

Or l’équilibre cosmique garanti par le tao est indifférent aux notions de juste et d’injuste, de bien et de mal, car tout est légitime et normal. Ne pas comprendre cela, s’attacher à ses idées égoïstes, c’est s’illusionner et souffrir.

Comprendre la nature du tao implique un changement de regard, l’entrée dans une nouvelle dimension spirituelle, un nouveau niveau de conscience : le sage est celui qui se laisse porter par le cours des choses, fusionnant avec le grand cosmos, ce qui lui permet d’accepter toute chose et de retrouver sa véritable nature.

Le Maître demeure dans les ténèbres, c’est-à-dire dans le tao profond, informe et indicible, mais évident et authentique. Le sage se laisse traverser pour toutes les choses : il n’a pas de pensée pour lui-même, ce qui peut laisser croire qu’il est fou ou stupide…

Enfin, la phrase « Je suis tel l’idiot, mon esprit est si vide » rappelle les paroles de Jésus : « Heureux les simples en esprit ».

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Modif. le 2 mai 2021

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