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Le serpent et son symbolisme

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Le serpent et son symbolisme dans les différentes traditions spirituelles et religieuses : quelle est sa signification ? Comment interpréter le serpent et l’Ouroboros ?

Le serpent est un animal archaïque, sans pattes, au sang froid. Son symbolisme très ancien est présent dans le monde entier, à travers différentes cultures et traditions spirituelles ou religieuses.

Selon les cas, le serpent est un symbole :

  • négatif : il symbolise le perte, la chute, la mort ; il est associé au diable, Satan ou Lucifer (créatures de Dieu s’étant retournées contre leur créateur). Le Léviathan quant à lui, est le monstre-serpent de l’Ancien Testament, associé au chaos. Dans la mythologie grecque, l’hydre de Lerne est un serpent à 9 têtes qu’Hercule doit combattre (cf. Les Douze Travaux),
  • positif : il évoque la sagesse, la Connaissance, la prudence (une des 4 vertus cardinales) ou encore le principe de la vie.

Le rapport de l’homme au serpent est ambigu : influence, tentation, pouvoir hypnotique… le serpent attire ou repousse, nous renvoyant à ce que nous avons de pire et de meilleur en nous.

Le serpent est énigmatique et mystérieux, il est capable de changer de peau et d’apparence, il peut sauver ou tromper.

Remarque : Le serpent se retrouve dans de nombreux contes et légendes, comme le Serpent Vert de Goethe.

Tentons de percer le symbolisme du serpent.

Le symbolisme du serpent : le caducée.

Le caducée, attribut d’Hermès (Mercure), représente deux serpents autour d’une baguette, comme pour unir la dualité dans l’équilibre. Les deux courants cosmiques contraires s’enroulent en spirale autour de l’axe du monde, ou arbre de vie.

Les serpents sont donc à la fois positif et négatif, bien et mal, jour et nuit, ciel et terre. Ils s’élèvent vers le spirituel, à la recherche d’une voie de délivrance et de guérison. 

caducée serpent

Le caducée est l’emblème du commerce, et sous des formes différentes, l’emblème de certaines professions médicales.

Le symbolisme du serpent d’airain de Moïse.

Après avoir constaté l’ingratitude des hommes, Dieu permet aux serpents d’attaquer son peuple. Ce n’est que lorsque Moïse se met à prier et à se confesser, que Dieu lui donne un remède pour guérir les morsures : l’alliance est rétablie.

7) Le peuple vint à Moïse, et dit : Nous avons péché, car nous avons parlé contre l’Éternel et contre toi. Prie l’Éternel, afin qu’il éloigne de nous ces serpents. Moïse pria pour le peuple.
8) L’Eternel dit à Moïse : Fais-toi un serpent brûlant, et place-le sur une perche ; quiconque aura été mordu, et le regardera, conservera la vie.
9) Moïse fit un serpent d’airain, et le plaça sur une perche ; et quiconque avait été mordu par un serpent, et regardait le serpent d’airain, conservait la vie.

Nombres, 21, 7-9

Jésus sera aussi plus tard considéré comme le « serpent d’airain sur la croix ».

L’Ouroboros : le Roi serpent.

L’Ouroboros (du copte ouro, « roi », et de l’hébraïque ob, « serpent ») est le Roi serpent. Il représente un serpent qui se mord la queue, symbolisant l’auto-fécondation et la vie.

ouroboros

L’Ouroboros évoque le cercle et le chiffre 0, autrement dit :

  • l’esprit,
  • la volonté créatrice, source de vie,
  • la chose primordiale,
  • la totalité de l’univers (l’œuf du monde),
  • la réconciliation de toutes les oppositions : début et fin, mort et renaissance, disparition et régénération…
  • les cycles et l’éternel retour,
  • le temps et la continuité,
  • l’éternité,
  • l’immortalité,
  • etc.

Au final, l’Ouroboros peut être vu comme un signe de sagesse et de connaissance : il réconcilie la dualité dans l’unité.

L’Ouroboros symbolise aussi l’infini, il est d’ailleurs parfois représenté sous la forme d’un huit couché :

serpent symbole infini

Il n’est pas sans rappeler Ananta, serpent cosmique de la mythologie hindouiste qui porte les cycles infinis du renouvellement du monde. Ananta est le dieu des ténèbres : installé au nadir, il porte le monde et le régénère sans cesse.

Il rappelle aussi le serpent tenu dans la main de Cernunnos, dieu celte coiffé de bois de cerf, présidant au cycles de la nature ; ce serpent à tête de bélier représente l’unité de la culture celtique.

L’Ouroboros est aussi :

  • un symbole alchimique, théosophique et maçonnique : l’Ouroboros est « Un-le-Tout », la totalité qui contient son Principe en elle-même. Le Roi serpent (ou le dragon) représente aussi le processus d’affinage et de transmutation grâce à son venin qui a le pouvoir de dissoudre, de transformer, de recréer. Il peut en outre représenter l’union parfaite du Soufre (esprit divin) et du Mercure (âme humaine). Lire aussi notre article sur Un-le-Tout.
  • un symbole du gnosticisme : pour les adeptes des sectes ophites (début de l’ère chrétienne), adoratrices du serpent, ce dernier donne accès à la gnose, c’est-à-dire à la Connaissance universelle. Il s’agit d’une interprétation du Livre de la Genèse selon laquelle le serpent serait le sauveur d’Adam et Ève, les incitant à croquer du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal pour ouvrir leur conscience. Le Dieu de l’Ancien Testament serait au contraire un être diabolique, pour preuve la punition qu’il a infligée à Adam et Ève. Nous avons ici à faire à une vision dualiste manichéenne.

Lire aussi notre article complet sur l’Ouroboros.

Le serpent tentateur du livre de la Genèse.

Le symbolisme du serpent est indissociable de l’Ancien Testament.

Dans le Livre de la Genèse, le serpent est l’animal tentateur qui conduit Adam et Ève à la faute.

1) Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs, que l’Éternel Dieu avait faits. Il dit à la femme : Dieu a-t-il réellement dit : Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ?
2) La femme répondit au serpent : Nous mangeons du fruit des arbres du jardin.
3) Mais quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin
Dieu a dit : Vous n’en mangerez point et vous n’y toucherez point, de peur que vous ne mouriez.
4) Alors le serpent dit à la femme : Vous ne mourrez point ;

5) mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal.
6) La femme vit que l’arbre était bon à manger et agréable à la vue, et qu’il était précieux pour ouvrir l’intelligence ; elle prit de son fruit, et en mangea ; elle en donna aussi à son mari, qui était auprès d’elle, et il en mangea.
Genèse 3, 1-6

Dans la Genèse, le serpent symbolise l’orgueil qui amène à vouloir posséder le fruit de la connaissance pour soi-même, sans effort, pour régner et dominer. Cet égoïsme provoque un décentrage par rapport à la loi divine et aboutit au malheur.

Suite à cet épisode, Dieu punit le serpent :

L’Éternel Dieu dit au serpent : Puisque tu as fait cela, tu seras maudit entre tout le bétail et entre tous les animaux des champs, tu marcheras sur ton ventre, et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie.
Genèse 3, 14

Le serpent qui rampe représente l’horizontalité, l’attachement à la matière, l’impossibilité de s’élever pour atteindre la loi divine. Le serpent vit dans le désert, lieu de désolation contrastant avec la magnificence du jardin d’Eden. Le désert est précisément le lieu où Jésus sera tenté par Satan durant 40 jours (Matthieu, 4, 1-11).

Le symbolisme du serpent dans l’Egypte ancienne.

Dans l’Egypte ancienne, Apophis est le dieu serpent, symbole des forces mauvaises de la nuit. Il évoque le chaos qui règne sur le monde souterrain, monde que les pharaons traversent sur leur barque mortuaire avant de rejoindre Noun : l’Océan primordial.

Le dieu solaire Rê fait quant à lui le voyage chaque jour : chaque matin il ressort victorieux de son combat contre Apophis.

Le serpent : un des Trois Poisons du bouddhisme.

Dans le bouddhisme, le serpent est symbole de l’aversion : c’est l’un des Trois Poisons représentés au centre de la roue des existences.

Le serpent répand son venin et cause la souffrance : il symbolise la colère et le rejet qui rampent en nous-mêmes.

A noter que les deux autres poisons sont le porc (l’ignorance) et le coq (la « soif » ou attachement).

Le Quetzalcoatl : le serpent à plumes.

Le culte du serpent à plumes, ou oiseau-serpent, était un culte majeur en Mésoamérique. Le Quetzalcoatl peut représenter, entre autres, l’alliance de l’eau et du feu, de la pluie et du soleil, l’équilibrage de cette dualité permettant force et fécondité.

En Chine : du serpent au dragon.

Dans la culture chinoise, le serpent est destiné à devenir un dragon, symbole de la puissance impériale. Le dragon n’est autre qu’un serpent « augmenté », disposant d’ailes et de pattes.

La kundalini dans le yoga.

Dans le yoga, la kundalini, ou serpent de feu, est l’énergie vitale lovée au bas de la colonne vertébrale qui peut être éveillée entre autres par la méditation. Elle remonte alors le long de la colonne pour activer les centres du psychisme (chakras) : c’est la montée du désir de vie qui donne accès à la conscience et à la connaissance.

Le serpent et son symbolisme dans la Kabbale.

On retrouve le serpent dans la tradition kabbalistique, en particulier à travers l’interprétation de la lettre Teth, neuvième lettre de l’alphabet hébraïque.

Teth présente la forme d’un vase dans lequel pourrait se lover un serpent. Le vase est ouvert : le serpent peut donc se dresser. Le vase, c’est notre corps ; le serpent, c’est notre énergie spirituelle, qui ne demande qu’à s’élever.

Le symbolisme du serpent en psychanalyse.

Sur le plan psychanalytique, le symbolisme du serpent renvoie au fonctionnement de notre psychisme : il représente l’invisibilité, l’obscurité, les bas instincts qui peuvent jaillir à tout moment, les passions insaisissables ou encore les couches profondes de l’âme.

Le serpent évoque donc l’âme et, en tant que symbole phallique, la libido qui gouverne nos instincts.

D’autres traditions associent le serpent à l’âme et à l’eau, qui coule toujours vers le bas.

Enfin, la symbolique du serpent dans les rêves a beaucoup été étudiée : pulsion sexuelle, désir, image du sexe masculin, etc.

Au final, le serpent est un symbole contradictoire et ambigu, mais particulièrement éclairant par sa dimension cosmique et universelle. Il touche à l’immortalité et à l’éternité, pour peu que nous réussissions à percer l’intimité de notre psychisme.

Pour votre bibliothèque :

  • Dictionnaire des symbolesde Gheerbrant et Chevalier. Avec ses 1600 articles, cet ouvrage est une référence dans l’étude des symboles.

Modif. le 21 juillet 2021

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