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L’Orient éternel et son symbolisme maçonnique

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L’Orient éternel : qu’est-ce que c’est ? Quel symbolisme ? Comment entretenir la mémoire des Frères passés à l’Orient éternel ?

« Passer à l’Orient éternel » ou « rejoindre l’Orient éternel » sont des expressions que nous employons pour évoquer la mort et désigner les Frères qui nous ont quittés.

Mais qu’est-ce que la mort en franc-maçonnerie ? Et que peut bien être cet Orient éternel ?

Rappelons-le, l’Orient est traditionnellement la source de la vraie Lumière : le Temple de Salomon était ouvert sur l’Orient. L’Orient éternel est donc la « Lumière éternelle », autrement dit la vérité.

Associer la mort à la Lumière (et donc à la vérité) peut sembler étonnant. Dans notre tradition, la Lumière évoque surtout le logos et la vie ; or un mort ne parle pas et ne vit plus…

En réalité, l’Orient éternel semble l’expression d’une Lumière éternelle, immuable, non soumise aux cycles solaires. C’est une Lumière partout présente, capable de briller en pleine nuit. C’est la Lumière du caché, de l’inconnaissable, des ténèbres. Dans cette vision des choses, la mort est autant la fin de la vie que son début, et tout ce qui semble opposé finit par s’unir.

Avant d’évoquer l’Orient éternel plus en détails, précisons que notre objectif n’est pas ici de nous interroger sur la persistance d’une forme de conscience après la mort, ni sur la réincarnation, ni sur le devenir de l’âme humaine, chacun étant libre de ses croyances.

Tentons de percer le symbolisme maçonnique de l’Orient éternel.

Lire aussi nos articles sur la mort en franc-maçonnerie et sur la vie après la mort.

L’Orient éternel : le retour au Tout.

Au cours de sa vie, le franc-maçon voyage de l’Orient à l’Occident et de l’Occident à l’Orient pour tenter de retrouver les secrets perdus de la Connaissance. Il décrit ainsi un cercle qui s’achève sur lui-même, à l’Orient éternel.

La deuxième partie de ce cycle correspond à la dernière partie de notre vie, marquée autant par notre déclin physique que par nos progrès spirituels : nous travaillons de midi à minuit, minuit pouvant symboliser là encore le point d’accès à l’Orient éternel.

Le retour à l’Orient éternel peut être vu comme le retour au stade primordial, celui qui précède la dualité. C’est le retour à l’unité, au Tout. C’est aussi le retour au silence qui était le nôtre avant de naître. La mort nous permet ainsi de retrouver notre authenticité première, celle d’un « être » non séparé, universel, absolu, dépassant l’espace et le temps, inclus dans la totalité cosmique.

Perdre la vie, c’est donc renaître au Tout. Il ne s’agit pas d’une disparition, mais d’une réconciliation définitive avec toute chose. De fait, la matière organique que nous étions servira à composer d’autres êtres vivants. L’immatériel que nous étions (notre esprit, nos idées, nos comportements, nos actions) continuera à nourrir le grand continuum de l’humanité.

Ainsi, en retournant à la poussière, au rien, nous retournons au Tout. Et en retournant au Tout, nous retournons à la source de toutes les choses.

De la pierre vive à la pierre cosmique.

Si le Frère passé à l’Orient éternel n’est plus une « pierre vive », il reste une pierre à part entière, sur laquelle il est possible de continuer à bâtir l’édifice humain.

Cette pierre ancienne est devenue fondation. Elle est indestructible. Sans elle, l’édifice tout entier s’effondrerait et nous ne serions pas là pour en parler. Et quand bien même le souvenir du Frère décédé se serait totalement perdu, aurait été oublié à jamais, cette pierre continuerait à supporter l’édifice.

En réalité, cette pierre ancienne, attachée au passé, fonde l’avenir. Le franc-maçon passé à l’Orient éternel ne cherche plus à édifier le Temple, il est le Temple tout entier. Il est la grande pierre cosmique, ou encore le ciment qui tient toutes les pierres.

Ce ciment, c’est le souffle qui crée et anime toute chose, c’est peut-être aussi la conscience universelle.

Ce peut être encore la méthode maçonnique que nos anciens ont contribué à parfaire, et qui permet à l’édifice de continuer à grandir.

L’Orient éternel et la chaine d’union.

Le moment où les Frères passés à l’Orient éternel sont les plus présents à nos côtés est sans aucun doute celui de la chaine d’union.

Ici, le mot « chaine » prend tout son sens. La chaine est composée de maillons, qui symbolisent les franc-maçons (ou les êtres humains en général) et le lien qui les unit.

Or, tous les maillons de la chaine sont nécessaires et irremplaçables. La chaine s’étend aussi bien dans le passé que vers l’avenir, ces deux temps fusionnant dans le présent.

Il est donc bien naturel d’intégrer nos Frères passés à l’Orient éternel dans la chaine : nous sommes leurs héritiers directs, nous avons reçu leurs savoirs, leur méthode, leur exemple. Nous vivons à travers eux, et ils continuent à vivre à travers nous.

Cette chaine, c’est donc celle de la vie et de la transmission. C’est aussi celle du progrès, qui ne peut se fonder que sur la mort puisque l’élève est destiné à dépasser le maître.

L’Orient éternel : un passage.

Au-delà de ces considérations, l’Orient éternel évoque un moment particulièrement douloureux, celui du déclin et de l’agonie.

Il s’agit d’un passage (le bouddhisme parle d’un bardo) qui mène à l’extinction de notre individualité. La perspective de la mort est toujours une souffrance, car notre ego n’admet pas de diminuer et encore moins de disparaître.

Mais cette souffrance porte en elle la promesse de l’extinction de la souffrance, puisqu’une fois mort, l’ego ne fera plus obstacle à la vérité, une vérité qui ne sera donc plus liée à notre individualité, mais au Tout. Elle sera donc très certainement un havre de Paix et de Bonheur.

L’extinction de notre ego ne signifie pas notre disparition totale. Comme vu plus haut, ce que nous avons été continuera à marquer l’avenir conformément à la loi de la causalité.

Préparer notre passage à l’Orient éternel.

En conclusion, l’Orient éternel, ce « minuit éternel », n’est pas la mort de la Lumière, mais une nouvelle manière de vivre la Lumière. Dans ce monde nouveau, tout n’est qu’Amour puisqu’il n’y a plus de dualité, plus de séparation. En réalité, ce monde nous frôle à chaque instant de notre vie, et plus nous vieillissons, plus il nous appelle.

Car la vie, dans son infinie sagesse, a programmé le vieillissement et la mort de chaque individu : c’est ce que les scientifiques appellent le « suicide cellulaire ». Retourner au Tout est donc inéluctable et indispensable.

Précisément, c’est ce à quoi nous prépare le travail maçonnique : nous taillons notre pierre brute afin qu’elle puisse s’insérer dans le Tout, au-delà de l’illusion de la séparation. Nous tentons de maîtriser notre ego pour nous ouvrir pleinement aux autres et au monde.

Si le travail est bien fait, le franc-maçon a une chance de découvrir en lui la pierre cachée, universelle. Il pourra alors regarder la mort en face. En paix avec lui-même, il domptera sa peur et sa tristesse en vue de l’ultime « sacrifice ».

Voir au-delà de la peur, se projeter au-delà de la tristesse, c’est cultiver la confiance et l’espérance, qui forment sans aucun doute le socle de la foi maçonnique.

Mes Frères, gémissons, gémissons, gémissons, mais espérons.

Voir aussi : Rituel de tenue funèbre maçonnique (REAA)

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Modif. le 11 mars 2024

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