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Le mythe de Prométhée (Platon) : explication

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Le mythe de Prométhée (Platon) : explication. Quel est la signification de cette légende ? Comment l’interpréter ?

Vieux de près de 3000 ans, le mythe de Prométhée nous a été transmis par les auteurs de la Grèce antique, notamment Hésiode, Eschyle, Platon et Diogène le cynique.

Dans la mythologie, Prométhée est un Titan, autrement dit une créature primordiale agissant au service des dieux.

Nous nous intéresserons ici au mythe de Prométhée tel qu’il est rapporté par Platon dans son oeuvre Protagoras. Platon met en scène deux Titans : Prométhée et Epiméthée, qui sont frères. Tous deux sont chargés par les dieux de façonner les espèces animales, et d’attribuer à chacune d’elles les qualités et facultés appropriées.

Epiméthée insiste pour accomplir seul cette tâche, demandant à Prométhée de venir vérifier son travail une fois celui-ci achevé, ce que Prométhée accepte.

Epiméthée attribue avec soin les facultés à chacune des espèces, mais il s’aperçoit qu’il a oublié la race humaine, laquelle se trouve totalement dépourvue, nue et faible. Les deux Titans sont embarrassés.

Prométhée décide alors de voler à Héphaïstos (dieu du feu, de la forge et de la métallurgie) et Athéna (déesse de la sagesse) le feu de la connaissance pour en faire présent aux hommes. Ce feu sacré permettra à l’humanité de maîtriser les arts, les sciences et les techniques, et donc de subsister par elle-même.

Les dieux décident de punir Prométhée pour ce vol.

Pour un résumé complet du texte, voir : Mythe de Prométhée, texte et résumé.

Le mythe de Prométhée a une résonance très actuelle. Il éclaire la condition humaine et le destin particulier de l’homme au sein de la Nature. Il évoque le péché originel, le décentrage et le déracinement de l’humanité, le mal et le malheur.

Tentons une explication du mythe de Prométhée selon Platon.

Lire aussi notre article sur le symbolisme du feu.

Le mythe de Prométhée : explication.

Le mythe de Prométhée recèle un symbolisme profond. Il décrit l’irruption de l’erreur et du mal en tant que principe s’opposant aux dieux bons. Le thème est celui de la chute de l’humanité et de l’émergence de la civilisation.

Prométhée et Epiméthée : dualité, séparation.

Prométhée et Epiméthée sont deux frères qui se ressemblent : ils ont tous les deux la volonté de bien faire, mais ils tombent dans le piège de l’étourderie et de l’erreur.

Dans la mythologie grecque, les Titans symbolisent les forces brutes de la Terre ayant tendance à se révolter contre les forces de l’esprit (Zeus). Nous avons là un premier dualisme.

Prométhée et Epiméthée représentent la séparation (qui est une caractéristique de la matière) : les deux Titans ont voulu travailler séparément à la création des espèces ; en réalité, Epiméthée a voulu tout faire tout seul, sans doute par orgueil. On peut imaginer que si les deux frères avaient travaillé ensemble, ils n’auraient pas commis d’erreur.

C’est donc la séparation qui fonde l’erreur et le mal.

La différence entre les hommes et les animaux.

Le mythe de Prométhée éclaire la différence fondamentale qui existe entre les hommes et les animaux.

Epiméthée a parfaitement réparti les qualités entre les animaux, garantissant l’équilibre et l’harmonie au sein de la Nature : les animaux les plus puissants sont aussi les plus limités, les animaux les plus fragiles sont dotés d’autres atouts permettant leur conservation. Tout est en ordre.

L’Homme fait exception : Epiméthée ayant réparti toutes les qualités et attributs sur les différentes espèces animales, il ne reste plus rien pour les hommes. Prométhée décide alors de voler le feu sacré de la connaissance afin de l’offrir aux hommes, de manière à ce qu’ils puissent se confectionner eux-mêmes armes et habits.

C’est ainsi que les hommes se retrouvent à partager avec les dieux des attributs supérieurs : le savoir, l’intelligence, mais aussi un certain niveau de conscience.

De fait, le mythe de Prométhée pose les bases d’un rapport ambigu entre les hommes et les dieux :

  • les hommes possèdent désormais une part de divin, ce qui les pousse à se tourner vers les dieux et à les vénérer : une relation s’établit,
  • d’un autre côté, la condition humaine est fondée sur l’erreur et l’interdit, ce qui ne peut que provoquer la colère des dieux et le malheur de l’humanité.

D’autre part, le mythe de Prométhée éclaire le déséquilibre fondamental qui existe au sein de la Nature : l’homme étant doté d’un pouvoir supérieur, l’harmonie générale est remise en cause. La crise écologique actuelle en est la parfaite illustration.

Le symbolisme du feu.

Le feu que Prométhée a volé aux dieux symbolise la connaissance. C’est en l’occurrence la connaissance des arts, des sciences et des techniques qui permettent de modeler et de transformer la Nature (agriculture, artisanat, industrie, architecture…) ; c’est autant le travail manuel que la conception et la créativité.

Cette connaissance est liée à la conscience : elle dépasse le simple savoir, elle est dynamique, animée comme une flamme.

Notons que la connaissance est dérobée à Héphaïstos (dieu du feu, de la forge et de la métallurgie) et à Athéna (déesse de la sagesse) : on retrouve ici les deux aspects de la connaissance, concret et abstrait.

Mais, le feu de la connaissance étant normalement réservé aux dieux, l’utiliser comporte un risque de dérive. Mal contrôlé, le feu est susceptible de tout ravager sur son passage, détruisant la Nature, annihilant les espèces… et l’Homme lui-même.

Lire aussi notre article sur le symbolisme de la lumière.

Le péché originel et ses conséquences.

Le vol du feu sacré de la connaissance rappelle le péché originel du livre de la Genèse (Ancien Testament). Après avoir croqué du fruit défendu de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, Adam et Eve sont chassés du paradis : ils entrent dans un monde de travail, de souffrance, de honte et de mort.

Notons cependant que dans le mythe de Prométhée, ce n’est pas un homme qui commet le péché originel, mais un Titan. Ce Titan (Prométhée) rappelle le serpent tentateur du livre de la Genèse, notamment dans son caractère rusé et décentré.

Quoi qu’il en soit, l’Homme intègre sa nouvelle condition : désormais, il doit travailler pour subsister. Il perd son caractère spontané et naturel ; il est condamné à vivre dans l’effort, le questionnement, le doute, la honte et la culpabilité.

Dans le même ordre d’idée, le poète grec Hésiode raconte comment Pandore, première femme humaine, fut créée sur ordre de Zeus pour se venger des hommes suite au vol du feu par Prométhée. Zeus offre la main de Pandore à Épiméthée, qui l’accepte sans se méfier. Dans ses bagages, Pandore apporte une boîte qui contient tous les maux de l’humanité (vieillesse, maladie, guerre, famine, misère, folie, vice, tromperie, passion, orgueil et espérance). Pandore ouvre la boîte : tous les maux s’échappent, sauf un : l’espérance.

Au final, le mythe de Prométhée pointe le risque de déséquilibre et de décentrage dû à la condition humaine. L’Homme possède le feu sacré de la connaissance, mais en est-il vraiment digne ? Les désordres écologiques actuels semblent indiquer que non.

L’Homme devra se réinventer pour survivre, peut-être en passant un nouveau pacte avec les dieux, autrement dit en pratiquant une nouvelle spiritualité. Car le principal obstacle à la survie de l’Homme est l’Homme lui-même. A ce titre, le mythe de Prométhée peut être assimilé à celui du progrès technique.

Lire aussi notre article : Mythe de Prométhée, texte complet et résumé.

Modif. le 18 janvier 2021

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