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Gaïa : signification spirituelle (la Terre être vivant)

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Gaïa : signification spirituelle. Qui est Gaïa ? Qu’est-ce que « l’hypothèse Gaïa » ou la « théorie Gaïa » ?

Gaïa est un concept qui touche à la mythologie, aux sciences, à la philosophie et à la spiritualité.

A l’origine, Gaïa (« terre » en grec ancien) est une déesse mythologique (voir la théogonie d’Hésiode). C’est une divinité de toute première importance, puisque Gaïa donne naissance à toutes les autres divinités et créatures : c’est donc la puissance créatrice, féconde.

Gaïa est elle-même issue du chaos primordial : elle est donc la première force organisée, signe de l’émergence d’une forme de vie et de conscience au sein de la matière. Gaïa enfante Ouranos (le dieu du Ciel) pour que ce dernier puisse l’envelopper de sa présence et la féconder ; par suite Gaïa et Ouranos donnent naissance aux Titans (dont Cronos), divinités qui précèdent les dieux de l’Olympe.

Face au caractère autoritaire et désordonné d’Ouranos, qui n’hésite pas à ensevelir dans les profondeurs de la Terre ses propres enfants, Gaïa s’allie à son fils Cronos pour renverser Ouranos. Elle confectionne une faucille qu’elle confie à Cronos, avec laquelle ce dernier coupe les parties génitales de son père. Ces dernières, en flottant sur les eaux, engendreront la belle Aphrodite (Vénus). Plus tard, le petit-fils de Gaïa, Zeus, se révoltera lui-même contre Cronos, comme si le récit mythologique était en quête permanente d’un dieu meilleur.

Ces conflits entre les descendants de Gaïa (ou théomachie) montrent la double nature de la déesse primordiale : à la fois créatrice et destructrice, belle et terrible. Nous retrouvons là les caractéristiques de la Nature vivante telle que nous la connaissons.

Gaïa est donc associé à la Nature. C’est la raison pour laquelle le scientifique James Lovelock a appelé « hypothèse Gaïa » sa théorie selon laquelle la Terre peut être assimilée à un organisme vivant auto-régulé et unitaire.

Selon cette théorie :

  • l’ensemble des êtres vivants sur Terre (biomasse) formerait une sorte de superorganisme,
  • la planète Terre doit être vue comme un ensemble cohérent, incluant le règne vivant et le non-vivant, dans une sorte d’harmonie globale. Ainsi, biosphère, lithosphère, hydrosphère et atmosphère seraient interconnectés,
  • la vie est un phénomène qui ne doit pas être séparé de son milieu, les interactions étant au coeur de l’hypothèse gaïenne. Bien au-delà de la simple adaptation des êtres vivants à leur milieu, il y aurait une continuité entre le monde vivant et le monde inerte, entre le biologique et le non-biologique,
  • de fait, le milieu a aussi un rôle à jouer dans le maintien de l’équilibre entre les espèces et de la vie en général.

L’hypothèse Gaïa a donc tendance à effacer toutes les barrières entre vivant, non-vivant, milieu, chimie, biologie, climat, gravitation, etc.

L’hypothèse Gaïa a par la suite alimenté de nombreux courants écologistes et New Age (spiritualité, mysticisme, néopaganisme…). Ces derniers voient en Gaïa un grand être vivant ou une déesse à vénérer. Pourtant, la théorie scientifique exposée plus haut n’a jamais attribué à Gaïa une quelconque conscience ou intelligence globale, même si la référence au nom de la déesse grecque peut le sous-entendre.

Quoi qu’il en soit, Gaïa nous interroge sur le mécanisme de la vie et du cosmos, et sur notre place au sein de la Nature et du « Tout ». Des questions d’autant plus importantes que la crise écologique se précise.

Car le fait est que l’Homme a progressivement perdu contact avec Gaïa. Ayant abandonné ses forces spirituelles au profit d’une fuite en avant utilitariste, il s’est déconnecté, déraciné, coupé de la Terre.

Tentons d’aborder la signification spirituelle de Gaïa.

Gaïa : signification spirituelle, philosophique et scientifique

Sur le plan scientifique, Gaïa désigne la « planète vivante » : le système-Terre unique autorégulé, composé d’éléments physiques, chimiques, biologiques et humains qui interagissent entre eux.

Sur le plan philosophique, Gaïa peut être assimilée à la Nature, non pas au sens d’univers ou de cosmos, mais au sens de milieu vivant, à savoir la Terre qui porte les hommes et les autres êtres vivants. Ce milieu est régi par des lois précises : les « lois gaïennes ».

Sur la plan spirituel, Gaïa est un espace de vie et de conscience : c’est là que se déroule notre expérience humaine, à la fois physique et spirituelle. Regarder Gaïa, c’est donc nous regarder nous-mêmes, c’est observer notre condition et approcher notre « nature » profonde.

Gaïa peut encore être vue comme :

  • la Mère (ou la Source) dont nous sommes tous issus,
  • notre Maison commune, notre foyer ou notre famille.

On le voit, Gaïa en tant que système de vie cohérent et unitaire possède une signification profonde.

Interconnexion et interdépendance

Le concept de Gaïa invite à reconnaître le caractère interconnecté de toute chose, ce qui n’est pas sans rappeler la philosophie bouddhique.

Dans le bouddhisme, l’interdépendance est le constat que tous les phénomènes, objets ou individus sont liés entre eux. Ainsi, rien n’existe en soi : c’est notre ego qui nous fait penser que les choses sont séparées, et qui nous pousse à nous considérer comme des individus autonomes, ou comme une espèce supérieure.

Comprendre l’interdépendance, c’est réaliser que notre présence au monde découle d’une infinité de causes, dans un système cohérent et équilibré. Ainsi, nous sommes les enfants de la Terre, des roches, de la pluie, des arbres, des plantes, des rivières et du Soleil, car tous ces éléments déterminent ce que nous sommes aujourd’hui. Autrement dit, nous sommes au carrefour de toutes les forces de la Nature.

L’unité et l’âme du monde

La philosophie stoïcienne s’attache elle-aussi à démontrer l’interdépendance de toute chose.

Pour les Stoïciens, Dieu est la Nature elle-même, dans toute sa cohérence. Tous les phénomènes sont imbriqués, logiques et ordonnés. Il y a une continuité et une cohérence entre toutes les choses : c’est la sympatheia.

Cette sympatheia stoïcienne constitue en quelque sorte l’âme du monde : c’est Gaïa en tant que grand être vivant, autrement dit la Terre personnifiée.

Le monde est un corps unifié. Posidonios (penseur stoïcien)

Le monde est un tout sympathique à lui-même. Posidonios

De même, l’unité de Gaïa peut aussi évoquer la quintessence alchimique (le cinquième élément qui assure la cohésion du Tout) ou encore la grande loi d’Amour qui lie toutes les choses entre elles.

Ainsi la dualité se trouve dépassée et réconciliée dans l’unité : c’est l’une des significations de Gaïa.

Les représentations symboliques de Gaïa

Gaïa peut être associée aux représentations symboliques suivantes :

  • la planète Terre, associée à la couleur bleue,
  • l’Arbre de Vie : c’est l’axe du monde, vecteur d’ordre et de vie au sein de la matière,
  • la Terre-mère : c’est par exemple la Pachamama, déesse de la Terre chez les anciens peuples de l’empire inca,
  • le tao du taoïsme : c’est la Grande-Mère, la Source, mais aussi la Voie à suivre,
  • “Dame Nature” : dans de nombreuses cultures, c’est la Nature en tant que femme féconde ou mère nourricière,
  • le Jardin d’Eden : dans le Livre de la Genèse (Ancien Testament), la Jardin d’Eden est le lieu paradisiaque et harmonieux où Adam et Eve évoluent avant qu’ils croquent le fruit défendu de l’arbre de la connaissance du bien et du mal,
  • etc.

Gaïa, réchauffement climatique et crise pandémique

L’homéostasie désigne la capacité d’un organisme ou d’un système à maintenir son équilibre intérieur : c’est l’objectif de tous les êtres vivants, y compris Gaïa.

En tant qu’êtres vivants, nous sommes parfois menacés par des bactéries ou des virus. En tant que vaste organisme vivant, Gaïa est elle-aussi confrontée à un risque de déséquilibre.

Précisément, l’Homme peut être considéré comme un virus à l’échelle de la Terre, attaquant ses équilibres biologique, hydrique, atmosphérique et géologique. La pollution des eaux peut être comparée à la pollution du sang de Gaïa. L’érosion peut rappeler la destruction de ses tissus épidermiques.

Un virus dont Gaïa chercherait à se débarrasser par un anticorps (le coronavirus) ou une poussée de fièvre : telle pourrait être l’explication du réchauffement climatique. La volonté de l’Homme de détruire la Nature pourrait amener Gaïa à nous détruire en retour.

Le développement rapide et anarchique de l’humanité peut aussi être comparé à un cancer qui ronge Gaïa.

Qu’il soit virus ou cancer, l’Homme s’est comporté comme s’il voulait rivaliser avec Gaïa. Par orgueil (cf. le mythe du péché originel), il s’est imaginé pouvoir prendre le contrôle de la Nature, s’octroyant tous les droits.

Mais depuis quelques décennies, une partie de l’humanité commence à mesurer les conséquences de ses actes : elle se pense à nouveau comme incluse dans le Tout.

L’urgence est là : la Terre se dérobe sous nos pieds ; pour la première fois, nous risquons de tout perdre. Nous n’avons d’autre choix que de retourner vers Gaïa, cette mère précieuse à qui nous devons tout. C’est l’espoir de réintégrer le paradis perdu.

Ainsi, la philosophie Gaïa représente l’entrée dans un nouveau système de conscience globale, se traduisant par un nouveau rapport à la Terre, à la fois plus rationnel et plus spirituel. Il s’agit de sortir de l’anthropocène et de regagner la Maison commune.

Conclusion sur Gaïa et sa signification spirituelle

Au final, Gaïa peut être vue comme un grand organisme vivant composé de deux couches étroitement imbriquées : la géosphère (inanimée) et la biosphère (vivante). A ces deux couches, il faut ajouter la noosphère, qui peut être définie comme la nouvelle strate humaine pensante. En effet, les capacités cognitives particulières de l’Homme constituent un phénomène particulier au sein de Gaïa.

Ce n’est pas pour autant qu’il faut considérer l’Homme comme étant séparé de Gaïa. Ni séparé, ni supérieur, l’Homme est un microcosme au sein du macrocosme planétaire Gaïa. Il est fait à son image, puisque constitué d’un corps, d’une âme vivante et d’un esprit, comme Gaïa est constituée d’une planète, d’une couche de vie et d’une mystérieuse énergie unitaire.

Au final, Gaïa est un tremplin spirituel. C’est un concept qui remet l’humanité à sa vraie place au sein du règne vivant et du Tout cosmique. C’est aussi un moyen pour chacun de retrouver son authenticité primordiale.

Lire aussi notre article : Ecologie et spiritualité : pour une renaissance spirituelle

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Modif. le 18 mars 2024

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