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L’évangile de Marie-Madeleine : interprétation

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L’évangile de Marie-Madeleine : interprétation et sens caché. Quelle signification et interprétation de ce texte gnostique ?

L’Évangile de Marie-Madeleine est le premier des quatre textes du codex de Berlin : un papyrus contenant des textes chrétiens apocryphes en copte, acquis au Caire en 1896 par les Allemands, et actuellement conservé au Neues Museum de Berlin.

L’Évangile de Marie-Madeleine daterait du IIème siècle après J.-C. et aurait subi plusieurs réécritures au cours de sa transmission.

Voyons comment interpréter cet évangile.

Voir aussi : L’évangile de Marie-Madeleine : texte complet.

Qui était Marie-Madeleine ?

Marie-Madeleine a longtemps été un personnage composite, souvent assimilé à Marie de Béthanie ou la pécheresse anonyme du repas chez Simon.

Pour en savoir plus, voir l’article : Qui était Marie-Madeleine ?

L’évangile de Marie-Madeleine et sa nature.

L’évangile de Marie-Madeleine est un texte gnostique non reconnu par le Vatican. C’est donc un évangile apocryphe, à la différence des quatre évangiles canoniques.

La gnose est un courant qui s’est développé au cours des premiers siècles du christianisme et qui propose une voie de salut par la connaissance de Dieu grâce à une initiation aux mystères célestes révélés par Jésus. La gnose est de nature ésotérique. L’Eglise a assez tôt rejeté la gnose, lui préférant le salut par la foi et une religion ouverte à tous, et non seulement aux initiés.

L’évangile de Marie-Madeleine est typiquement gnostique en ce sens qu’il est pour une part la révélation d’un enseignement caché donné à Marie-Madeleine par Jésus. Cet évangile aborde le mystère de Dieu, de la matière, du Bien et du mal, de l’origine du monde, etc.

Voyons quelle interprétation tirer de l’évangile de Marie-Madeleine.

L’évangile de Marie-Madeleine : interprétation et signification.

L’évangile peut être divisé en deux parties : la première est la révélation de Jésus aux disciples, et la seconde, la révélation de Marie-Madeleine aux disciples, Jésus s’étant retiré.

Voir aussi : L’évangile de Marie-Madeleine : texte complet.

Voici une proposition d’interprétation de l’évangile de Marie-Madeleine, page par page.

Pages 1 à 6 : 

Ces pages sont manquantes. On peut supposer qu’il s’agit d’un enseignement de Jésus à ses disciples rassemblés.

Page 7 :

Enseignement de Jésus à ses disciples rassemblés. La question de la matière et de la nature sont abordées.

  • « tous les éléments de la nature sont imbriqués et unis entre eux ». Interprétation : tout est unité, tout est issu de la même source ; la dualité et les divisions ne sont qu’apparentes.
  • « tout reviendra à ses racines » : les choses n’existent que par leur racine, qui est Dieu. Dieu est la cause de toutes les choses.

Plus loin, Pierre interroge Jésus sur ce qu’est le péché. 

  • « il n’y a pas de péché. C’est vous qui faites exister le péché lorsque vous agissez conformément aux habitudes de votre nature adultère » : le péché n’existe donc pas dans l’absolu : il n’y a pas de mal, tout est ordre. Le mal est une interprétation mentale, ou encore une souffrance qui est due à un décentrage par rapport à la loi divine, c’est-à-dire à un excès d’orgueil. Le bonheur consisterait donc à tout accepter, à s’inscrire dans l’ordre des choses, car tout est Bien. Le paradis est donc bien sur Terre, pour peu que nous voulions le voir (voir l’article sur le Royaume de Dieu).
  • « Voilà pourquoi le Bien est venu parmi vous ; Il a participé aux éléments de votre nature afin de l’unir de nouveau à ses racines » : ainsi le Bien peut être vu, non pas comme l’opposé du mal, mais comme un recentrage, un rappel de l’Ordre universel et divin, et le souvenir que toutes les choses et tous les êtres sont issus de la même racine : Dieu. Par conséquent, nous sommes tous le même être, chacun de nous est le dépositaire d’une parcelle divine. Cette unité porte un autre nom : l’Amour universel.
  • « Voici pourquoi vous êtes malades et pourquoi vous mourrez, c’est la conséquence de vos actes ; vous faites ce qui vous éloigne… » : ce passage rappelle le péché originel d’Adam et Eve. En croquant le fruit défendu de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, l’homme abandonné à son orgueil a connu le travail, la maladie et la mort. Si l’on considère que ces choses sont « mauvaises », alors nous interprétons et nous souffrons : nous nous éloignons de Dieu. Au contraire, si nous acceptons que ces choses font partie de la Vie, nous accédons au Bonheur, à la paix, à la sérénité et à la vie éternelle.

Page 8 : 

Suite de l’enseignement de Jésus à ses disciples rassemblés. Voici notre interprétation.

  • « L’attachement à la matière engendre une passion contre nature. Le trouble naît. Soyez en harmonie… Si vous êtes déréglés, inspirez-vous des représentations de votre vraie nature. » : l’amour de la matière est un dérèglement, une passion contre nature. En effet, l’homme ne doit pas aimer la matière pour l’exploiter ou se l’approprier (cf les « concupiscibles », ou désirs de possession), mais l’aimer en tant que création unitaire qui porte partout la marque de Dieu. Notre vraie nature est d’être une part du tout. Le bonheur consiste à être en harmonie avec le Tout.
  • « C’est à l’intérieur de vous qu’est le Fils de l’Homme » : le Fils de l’Homme est une expression qui désigne Jésus. Cela veut dire que Dieu est en nous. Par conséquent le Paradis aussi, pour peu que nous voulions bien le voir.

Puis Jésus demande aux disciples de partir annoncer l’ « Évangile du Royaume ».

Page 9 : 

Suite et fin de l’enseignement de Jésus à ses disciples rassemblés : « N’imposez aucune règle, hormis celle dont je fus le Témoin. »

Jésus se retire, laissant les disciples désemparés. Marie Madeleine les rassure : « Ne soyez pas dans la peine et le doute, car Sa Grâce vous accompagnera et vous protégera. » 

Page 10 :

Jésus parti, Marie-Madeleine révèle aux disciples de ce que lui a dit Jésus. C’est un enseignement secret.

  • « Alors, je Lui dis : « Seigneur, dans l’instant, celui qui contemple ton apparition, est-ce par l’âme qu’il voit ou par l’esprit ? » Le Maître répondit : « Ni par l’âme ni par l’esprit ; mais l’intellect étant entre les deux, c’est lui qui voit. » Jésus révèle que c’est l’intellect (l’esprit, la raison, ou encore le Noûs grec) qui permet d’accéder à Dieu. Cette révélation est typiquement gnostique : ça n’est pas la foi qui permet l’union avec le divin, mais le raisonnement. Pour les grecs, l’intelligence était la partie la plus divine de l’âme, celle qui permettait d’accéder au Principe premier.

Les pages 11 à 14 manquent.

Page 15 :

Marie-Madeleine décrit les différents stades de l’ascension de son âme pour accéder à la Vérité divine. Elle décrit une vision intérieure.

  • confrontation avec le Désir. Aux accusations du Désir, l’âme répond : « Moi, je t’ai vu, toi, tu ne m’as pas vue. Tu ne m’as pas reconnue ; j’étais avec toi comme avec un vêtement, et tu ne m’as pas sentie. » Ainsi l’âme se libère du désir par une prise de conscience de la présence du désir.
  • confrontation avec l’Ignorance. L’Ignorance reproche à l’âme d’avoir jusqu’ici vécu sans discernement. L’âme répond : « Pourquoi me juges-tu ? Moi je n’ai pas jugé. On m’a dominée, moi je n’ai pas dominé ; on ne m’a pas reconnue, mais moi, j’ai reconnu. » Là encore, l’âme se libère de l’Ignorance par une prise de conscience de son existence, sans auto-culpabilisation.

Page 16 :

Suite de la vision. L’âme de Marie-Madeleine continue de monter et se présente face à la quatrième Puissance, qui comporte 7 manifestations de la colère :

  1. Ténèbres,
  2. Désir,
  3. Ignorance,
  4. Jalousie mortelle,
  5. Emprise charnelle,
  6. Sagesse ivre,
  7. Sagesse rusée.

Remarque : dans la hiérarchie céleste, les « Puissances » forment le quatrième niveau, entre d’une part les Séraphins, les Chérubins et les Trônes, et d’autre part les Dominations, les Vertus, les Principautés, les Archanges et les Anges.

L’âme déjoue les accusations de la Colère : « Celui qui m’opprimait a été mis a mort ; celui qui m’étreignait n’est plus ; mon désir alors s’est apaisé, et je fus délivrée de mon ignorance. »

Il s’agit d’une libération mentale, d’une marche vers la paix et la sérénité.

Remarque : cette traversée rappelle les 7 sphères de la doctrine alchimique qui permettent l’élévation de l’âme.

Page 17 :

Le récit s’achève par la victoire de l’âme et son accession au repos et au silence : « Je vais au Silence. » Le silence évoque l’apaisement des pensées vaines, le recul de l’orgueil, l’accès à la paix intérieure.

André et Pierre confient alors leurs doutes aux autres disciples :

  • « Pour ma part, je ne crois pas que le Maître ait parlé ainsi. »
  • « Est-il possible que le Maître se soit entretenu ainsi, avec une femme, sur des secrets que nous, nous ignorons ? Devons-nous changer nos habitudes, écouter tous cette femme ? L’a-t-Il vraiment choisie et préférée à nous ? »

Page 18 :

Les réactions incrédules de Pierre et d’André provoquent la tristesse de Marie-Madeleine. Puis elle se défend de dire des mensonges.

Levi (Matthieu) prend sa défense : « si le Maître l’a rendue digne, qui es-tu pour la rejeter ? Assurément, le Maître la connaît très bien. Il l’a aimée plus que nous. »  Levi invite ensuite ses compagnons à devenir de véritables « êtres humains ».

Cet évangile témoigne donc d’un conflit à l’intérieur même du groupe. Ce conflit entre Pierre et Marie se retrouve dans d’autres écrits gnostiques. Pierre représente l’orthodoxie et le rejet du rôle des femmes dans l’Eglise. Marie-Madeleine représente un autre courant, gnostique et égalitaire, qui n’a pas été retenu par l’Eglise.

Page 19 : 

Les disciples se mettent enfin en route pour annoncer l’Évangile.

Lire aussi notre article sur Marie-Madeleine et le chiffre 7.

Ouvrages en rapport avec l’évangile de Marie-Madeleine et son interprétation :

Modif. le 21 mars 2021

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