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Etre de gauche ou de droite : qu’est-ce que ça signifie ?

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Etre de gauche ou de droite : définition. Que signifie être de droite ou de gauche ? Quelles sont les valeurs attachées à ces deux camps ? Comment comprendre le clivage droite-gauche en science politique et en philosophie ?

Traditionnellement, on attache à la droite les valeurs de liberté, de responsabilité, de travail, d’autorité, d’identité et de patriotisme, alors que la gauche serait plutôt associée à l’égalité, à la solidarité, au progrès social, à la tolérance et à l’universalisme.

Mais au-delà de ces considérations, se pose la question de l’origine et des ressorts profonds du clivage droite-gauche.

Dans cet article, droite et gauche seront analysées selon plusieurs axes :

  • le rapport aux autres,
  • le rapport aux étrangers et aux immigrés,
  • les relations internationales,
  • l’ordre social,
  • la vision du progrès,
  • et le rapport à la Nature.

Nous verrons que ces deux idéologies reposent sur des conceptions très différentes du rapport à l’autre et à l’environnement. Même si les valeurs de gauche semblent plus généreuses que celles de droite, cela n’est pas pour autant qu’elles doivent être jugées supérieures.

A noter que cet article n’a pas pour objectif de prendre position, mais de comprendre ce qui sous-tend les différences entre ces deux systèmes de pensée.

Voyons ce que signifie être de gauche ou de droite aujourd’hui.

Lire aussi notre article : Liberté, égalité, fraternité : définition et sens profond

Etre de gauche ou de droite : définition

Etre de gauche ou de droite doit être abordé en premier lieu par la question du rapport à l’autre.

Alors que la gauche envisage l’autre comme un égal ou comme un frère, la droite semble beaucoup plus prudente, pour ne pas dire méfiante vis-à-vis de l’autre.

La droite et le rapport à l’autre

La droite voit l’autre au pire comme un danger, au mieux comme un rival ou un concurrent.

Par conséquent, la philosophie de droite se fonde sur la lutte, la préservation, la protection et la conservation. Une attitude qui peut s’appuyer sur le droit à l’auto-défense, le droit de port d’arme, la force de la loi (à travers la police et la Justice) ou encore le rôle de l’armée.

Le rapport à l’autre peut être décrit à travers des cercles concentriques : la priorité est de défendre ses propres intérêts, puis ceux de sa famille, puis ceux de son clan ou de sa communauté, et enfin ceux de son pays.

Même quand l’autre ne constitue pas un danger, il n’en reste pas moins un concurrent. Précisément, vu de la droite, la vie en société consiste à se mesurer aux autres, certes en respectant les règles du jeu, le but étant de savoir qui pourra occuper les meilleures places.

Cette idéologie favorise les hiérarchies, les classements, les notes, les épreuves, les concours et les compétitions, par exemple sportives. Elle légitime aussi les inégalités, qui ne seraient que le reflet de la sélection naturelle : il est normal que certains occupent les rangs supérieurs et d’autres les rangs inférieurs, les différences étant fondées sur le talent, l’effort et le travail.

C’est ainsi que la philosophie de droite rend chacun responsable de sa propre condition : ceux qui se trouvent au bas de l’échelle n’auraient pas fait preuve d’une volonté suffisante pour s’élever, il est donc normal que leur condition soit moins favorable.

Par ailleurs, il semble logique que ceux qui ont acquis les meilleures places souhaitent les conserver le plus longtemps possible : l’ordre établi est donc défendu par la classe dominante, qui s’oppose ainsi aux velléités de réformes politiques et sociales.

La tendance est donc à verrouiller l’accès à certaines places, à favoriser l’entre-soi, à légitimer l’héritage et la rente, à abolir les droits de succession, puisque l’objectif est de perpétuer les privilèges et de transmettre les acquis (le capital social, culturel et économique) à ses enfants et à ses proches.

Ainsi, les favorisés multiplient les signes de reconnaissance, fréquentent les mêmes lieux de reproduction sociale (clubs, rallyes, écoles privées…), se distinguent par la maîtrise de compétences particulières ou de codes, par exemple l’orthographe.

Notons que la droite la plus dure est favorable à un système scolaire différencié et inégalitaire, les établissements de qualité étant de fait réservés à l’élite. Le sentiment de classe s’en trouve renforcé.

Ainsi, la droite considère les inégalités comme naturelles et normales. On notera simplement une nuance entre libéraux et conservateurs :

  • les libéraux sont favorables à un jeu ouvert : la concurrence entre les individus est susceptible de redistribuer les places, puisque de nouveaux talents peuvent surgir à tout moment,
  • les conservateurs souhaitent au contraire fermer le jeu et conserver leur position acquise ou héritée,
  • de ce fait, les libéraux qui réussissent dans la vie ont tendance à devenir conservateurs…

Paradoxalement, ces deux approches nourrissent les envies de révolte de ceux d’en bas : en effet, les dominés pourraient tenter de prendre la place des dominants, par la force.

La gauche et le rapport à l’autre

La philosophie de gauche est très éloignée du darwinisme social que nous venons de décrire. La gauche prône en effet un rapport à l’autre fondé sur l’égalité et la tolérance.

Il s’agit d’accorder à l’autre la même valeur qu’à soi-même, au-delà des différences liées aux parcours de vie. Ainsi, chacun est légitime à exister, à vivre paisiblement, à s’épanouir, quelles que soient ses caractéristiques, ses talents, ses capacités, son milieu ou son origine.

L’autre n’est pas perçu comme un danger, il n’est pas non plus un concurrent mais un alter ego, un être qui possède les mêmes attentes et les mêmes aspirations que soi-même : vivre correctement, être heureux, se réaliser.

C’est ainsi que la gauche préfère l’ouverture et la bienveillance à la méfiance et au repli.

Dans la vision de gauche, il ne devrait pas y avoir de hiérarchie à respecter, d’ordre social à conserver, ni de place à défendre. Personne n’est légitime à dominer durablement les autres. La société n’est pas fondée sur la compétition mais sur la compréhension, l’entraide et la complémentarité, le but étant le bonheur et l’harmonie au sein du corps social.

Dans cette perspective, l’Ecole se fixe pour objectif la réussite de chacun et l’épanouissement de tous. Les notes et les examens passent au second plan, le but n’étant plus de « trier » les bons et les moins bons.

Enfin, la vision de gauche implique que chacun ait son mot à dire dans le gouvernement du pays : chacun doit pouvoir participer aux décisions publiques. Ainsi, l’instauration d’une démocratie réelle est souhaitée, ce qui permettra de garantir l’égalité réelle.

Le rapport aux étrangers

Les principes que nous venons de décrire trouvent leur traduction la plus évidente dans la relation aux étrangers, notamment aux immigrés.

Etre de gauche ou de droite peut alors se définir comme suit : la droite aborde les étrangers par la différence, la gauche par la ressemblance.

Dans le premier cas, l’immigration est perçue comme un danger, notamment parce qu’elle est susceptible de bouleverser l’ordre établi, du fait du nombre des arrivants, de leur religion ou de leurs coutumes.

L’objectif sera alors de protéger les frontières, d’imposer des obligations aux immigrés ou de repousser les migrants, quitte à renoncer à certains principes humanitaires : c’est une question de survie. Certaines populations immigrées pourront toutefois être accueillies si le pays y trouve un intérêt économique (principe de l’immigration choisie), étant entendu qu’elles devront être cantonnées à un rang social subalterne, du moins dans un premier temps.

A noter que certains libéraux peuvent être favorables à l’immigration, dans une perspective de libre concurrence entre les individus.

Quant à la gauche, elle considère l’étranger comme un égal. Si différence il y a, elle est vue comme une occasion de partage et d’enrichissement. Ainsi, compréhension, compassion, assistance et inclusion fondent la politique migratoire de la gauche : une générosité qui se heurte parfois à la réalité.

Sur la question de l’immigration, la droite est parfois accusée de racisme, mot qu’il faut cependant réserver à la droite la plus identitaire et la plus nationaliste. La droite classique raisonne plutôt en terme de priorité : il s’agit de se montrer charitable envers les siens avant de se préoccuper des étrangers.

Vu de la droite, toute différence (culture, religion, couleur de peau, sexualité) est suspecte ; par conséquent, c’est à l’étranger (ou à celui qui est différent) de faire l’effort de s’intégrer, et non à la société de créer les conditions d’une bonne intégration. Autrement dit, les étrangers doivent mériter leur rang.

Cela explique aussi les différences dans l’approche de la laïcité :

  • la droite voit la laïcité comme un rempart vis-à-vis des influences étrangères,
  • au contraire, la gauche voit la laïcité comme une condition du vivre-ensemble : la garantie pour chacun de pouvoir pratiquer sa religion sans être inquiété.

On le voit, être de gauche ou de droite est donc très lié à la vision de l’étranger.

Droite et gauche dans les relations internationales

Patriote voire nationaliste, la droite défend la souveraineté nationale et s’appuie sur l’armée pour défendre le pays et garantir son indépendance. Le rôle et les valeurs militaires sont donc mises en avant.

Dans sa composante la plus dure, la droite défend le droit de la nation à conquérir, dominer ou coloniser les nations plus faibles ou moins « avancées » : cet impérialisme peut aussi être qualifié de « darwinisme ».

A l’inverse, la gauche prône la neutralité, la coopération, le dialogue et l’union entre les nations, des valeurs qui là encore se heurtent souvent à la réalité.

Etre de gauche ou de droite : différentes visions de l’ordre social

Etre de gauche ou de droite se traduit par deux visions opposées de l’ordre social.

La droite prône l’extension maximale du champ des libertés individuelles (libertarianisme). En termes clairs, chacun est légitime à rechercher un maximum de liberté et d’avantages, ce qui implique la lutte des uns contre les autres, la conquête d’espaces naturels, mais aussi la résistance contre un pouvoir central qui produirait trop de normes, d’obligations ou d’impôts.

Dans ce système, les plus forts obtiennent naturellement plus de richesses, de droits et de prérogatives que les plus faibles. A titre d’exemple, il semble normal qu’un dirigeant de grande entreprise ait plus d’avantages qu’un simple employé. Par ailleurs, il revient à chacun de défendre ses libertés acquises, en vue de les conserver le plus longtemps possible.

Vu de droite, les lois sont là pour fixer les règles du jeu, c’est-à-dire le cadre moral dans lequel la concurrence entre individus pourra s’exercer. La police et la Justice garantissent le respect du cadre : c’est ainsi que l’Etat doit s’en tenir à ses fonctions régaliennes. Les lois doivent rester simples et générales. Les tribunaux sont vus comme une manière « civilisée » de continuer le combat contre les autres.

Sur le plan judiciaire, la droite considère que la sanction doit être ferme, alors que la gauche s’attache à la compréhension des causes des déviances sociales, le but étant de donner une deuxième chance aux individus.

Ainsi, la gauche prend en compte le contexte et les influences (origine sociale, histoire personnelle, éducation reçue, culture, psychologie…) pour expliquer voire excuser les comportements, l’individu n’étant pas jugé responsable de son héritage social, culturel ou génétique.

Par conséquent, la gauche privilégie la réinsertion (c’est-à-dire le retour des individus déviants dans la société), alors que la droite prône la mise au ban, allant jusqu’à demander des peines lourdes voire définitives, comme la peine de mort.

D’autre part, dans l’optique de droite, il peut sembler normal que la loi aille dans le sens des puissants, puisque ces derniers ont réussi à atteindre le sommet de la hiérarchie sociale. A l’extrême, la loi peut devenir « loi privée », c’est-à-dire privilège.

Au contraire, pour la gauche, la liberté réside précisément dans la résistance aux privilèges et à l’oppression imposée par la classe dominante.

Deux visions du progrès

Pour les partisans de gauche, le progrès social consiste en une lutte pour l’égalité : il s’agit de s’attaquer aux privilèges, aux héritages, aux positions dominantes, aux inégalités de naissance, et plus généralement à tout système fondé sur la concurrence et la compétition, pour tendre vers une société moins violente, plus apaisée, plus inclusive et plus harmonieuse.

Côté droite, la vision du progrès est inverse. C’est la lutte pour la vie qui permet le progrès : le conflit et la concurrence font émerger les individus les plus performants, les plus intelligents et les plus innovants, lesquels garantiront la survie de l’espèce. Dans cette perspective, le progrès est intimement lié à l’innovation, en particulier technologique, dont on remarquera qu’elle naît souvent de la recherche militaire.

Etre de gauche ou de droite : le rapport à la Nature

Etre de gauche ou de droite s’apprécie aussi dans le rapport à la Nature.

La droite défend la liberté de l’Homme à exploiter et soumettre la Nature, qu’il justifie par le fait qu’il a chèrement conquis sa place au sommet du règne vivant.

Dans une logique de prédation et d’appropriation (on soulignera ici l’importance de la propriété privée), la droite considère que chacun est légitime à tenter d’étendre le plus possible son « domaine de liberté » en direction des espaces naturels exploitables ou des autres espèces, avec une justification de pratiques telles que la chasse. Le développement des grandes propriétés agricoles et de l’industrie relèvent de cette logique individualiste et utilitariste. Les conquêtes et la colonisation aussi. Ainsi, le sommet de la pyramide sociale est occupé par ceux qui ont accumulé le plus de terres, de ressources et de capital. Au bas de l’échelle se trouvent ceux qui ne possèdent rien, devenant eux-mêmes une ressource à exploiter.

Toutefois, la nouvelle droite prône une prédation encadrée : il y a des limites à ne pas franchir, des règles à respecter, des ressources à ne pas épuiser. Les atteintes à la biodiversité et au climat sont prises en compte, notamment si elles sont susceptibles de bouleverser la société et l’ordre établi.

Pour la gauche, la Nature doit être respectée et préservée. Elle n’est pas envisagée comme une ressource à exploiter mais comme un Tout dont l’Homme fait partie, une maison commune qu’il faut préserver. Dans sa dimension écologiste, la gauche prône l’équilibre entre les espèces voire l’antispécisme, la sobriété et le principe de précaution. Elle considère que la prédation, la volonté de domination et la course au profit mettent la maison commune en danger.

Les sources profondes du clivage droite-gauche

Au-delà de la description que nous venons de faire, il convient de chercher les racines profondes du clivage droite-gauche.

D’où vient le fait d’être de gauche ou de droite ? Quels sont les ressorts de cette appartenance ?

La réponse la plus évidente réside dans la psychologie de l’être humain : la pensée de droite se fonde principalement sur la peur (peur de l’autre, peur de perdre son rang ou son statut), une peur qui est intimement liée à l’instinct de conservation, et qui a pour pendant l’envie au sens de convoitise, inséparable de l’instinct de domination.

L’autre étant vu comme un adversaire ou une menace, les différentes stratégies possibles sont alors le repli, l’accumulation de réserves, l’attaque, la domination ou la protection derrière un rempart : l’ordre, la loi, la Justice, les traditions…

Ainsi, la pensée de droite est indissociable du conflit, un conflit que l’on tente d’organiser ou de réguler à travers certaines règles. Cet ordre par principe inégalitaire repose sur des valeurs telles que la performance, la responsabilité, l’autorité, les traditions, le travail ou encore le patriotisme.

A l’inverse, la philosophie de gauche se fonde sur l’effort d’ouverture et de compassion, dans une volonté de l’Homme de dépasser ses instincts animaux pour s’élever vers des idées plus grandes et plus nobles. L’autre est alors vu comme un autre soi-même, un pair, un frère. Ainsi, réciprocité, égalité, solidarité et fraternité fondent l’idéologie de gauche, dans une logique clairement humaniste et universaliste.

Pour simplifier à l’extrême, on pourrait dire que la droite se fonde sur une logique de séparation et la gauche sur une logique d’union, voire d’Amour.

Mais il ne s’agit pas ici de juger le fait d’être de gauche ou de droite en bien et en mal, ni de dire que l’un serait meilleur que l’autre.

Car l’idéologie de droite est peut-être celle qui épouse le mieux la nature et les caractéristiques de l’être humain ; elle constitue la réponse la plus civilisée possible aux conflits qui concernent tous les individus, autant en leur for intérieur que dans leurs rapports avec les autres. En effet, en tant qu’animal social, l’homme se mesure constamment à ses semblables, ce qui fait dire que l’équilibre social ne peut passer que par la régulation des conflits.

Sur le papier, les idées de gauche sont bien sûr plus généreuses que celles de droite. Elles représentent un idéal, un objectif vers lequel tout individu et toute société devraient tendre. Mais ces idées présentent un côté irréaliste, déconnecté de la vie réelle.

Par ailleurs, les idées de gauche sont souvent perverties, notamment lorsqu’elles tendent à excuser systématiquement les comportements négatifs : ce laxisme se révèle une impasse sociale. A l’inverse, les valeurs de droite peuvent s’avérer vertueuses lorsqu’elles tendent à la rigueur, à l’exigence, à la vigilance, à la constance, ou encore à la conservation d’un ordre social équitable : la fermeté dans la défense des valeurs justes permet d’éviter la décadence d’une société qui risquerait d’évoluer vers trop de tolérance, donc de faiblesse.

Dans les faits, toute société s’appuie à la fois sur des valeurs de droite et de gauche, tentant d’allier stabilité et progrès, présent et futur, réalisme et ambition, liberté et égalité, responsabilité et solidarité, identité et ouverture. L’Histoire montre que les sociétés ou régimes extrémistes, qu’ils soient de droite ou de gauche, n’ont pas d’avenir.

De même, les valeurs de gauche et de droite coexistent en chacun de nous, certes dans des proportions différentes et avec des variations au cours de notre vie : si notre priorité est de nous protéger, ça n’est pas pour autant que nous sommes incapables de nous ouvrir et d’aimer.

Reste la question du progrès : les sociétés ont-elles vocation à évoluer vers moins de conflit, plus de paix, de solidarité et de compréhension ? La violence sociale finira-t-elle par s’estomper pour laisser place à une harmonie durable ? C’est peut-être dans la manière de répondre à cette question que réside aujourd’hui le véritable clivage droite-gauche.

Etre de gauche ou de droite : test

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Modif. le 17 avril 2024

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